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		"Ce signe sur le tronc, il n'y était pas quand nous sommes passés 
		ce matin." 
		ou 
		encore : 
		"La marca aquí sus l'arbre, i èra pas quand sèm passats aqueste 
		matin" 
		 
		- 
		Les 
		cironstances du concours 
		- La tèsta 
		nauta 
		 
		
		Les circonstances du concours 
		 
		– Ce signe sur le tronc, il 
		n’y était pas quand nous sommes passés ce matin ! 
		hurle le chef en pointant du doigt une 
		marque blanchâtre, luisante de sève, au bas du hêtre planté à la croisée 
		des chemins. 
		– C’est incroyable, chuchote Jonas à mon oreille, il ne peut pas parler 
		normalement, il faut toujours qu’il aboie ! 
		Je souris tout en murmurant : 
		– Normal… il ressemble à un bouledogue ! 
		Les yeux globuleux du chef, sa lèvre lippue toujours luisante de salive 
		et si mobile qu’elle fait penser à une babine animale en font vraiment 
		un proche cousin du bouledogue. 
		– Mais chef, rétorque Lucas qui ne laisse rien passer et démarre au 
		quart de tour, vous ne pouvez pas nous accuser ! Vous nous avez fait 
		crapahuter autour de ces foutues montagnes toute la journée. Comment 
		l’un de nous aurait pu s’éclipser pour revenir marquer l’arbre ? Vous 
		l’auriez vu ! C’est impossible ! 
		Le chef interrompt sa diatribe : 
		– Qui t’accuse ? murmure-t-il, ce qui désarçonne Lucas. 
		– En même temps, lance Bob dans le silence qui suit, l’arbre n’en 
		crèvera pas, on peut donc laisser tomber, non ? 
		Sa remarque reste sans effet. 
		– Bon, voilà comment ça se présente, reprend le chef comme s’il 
		s’adressait à une foule alors que nous ne sommes que dix malheureux 
		gamins autour de lui. Le centre d’hébergement est à un quart d’heure 
		d’ici (soupir général de 
		soulagement), ce qui veut dire la douche chaude, l’infirmerie pour 
		les ampoules aux pieds, le dortoir pour un moment de repos avant le 
		repas, davantage de temps pour téléphoner à la famille… (On entend 
		chacun saliver.) Tout ça dans un 
		quart d’heure… un quart d’heure dans le meilleur des cas, si vous vous 
		débrouillez bien. Un quart d’heure qui peut s’étirer… s’étirer jusqu’à 
		devenir une bonne heure si vous vous débrouillez mal. À vous de voir. 
		Le chef se tait, promène son regard canin sur le petit groupe, essayant 
		de faire monter la pression ou le suspense. Mais on commence à le 
		connaître depuis une semaine qu’on l’a sur le dos, et personne ne tombe 
		dans le piège. Personne ne pose la question qu’il attend. Il finit donc 
		par reprendre, en aboyant à nouveau, visiblement vexé. 
		– Vous me trouvez une putain d’explication à la présence de ce signe qui 
		n’était pas là ce matin. Une explication logique, qui tienne la route. 
		Vous me sortez le bon truc et on rentre tout de suite, sinon… 
		Sa phrase ne reste pas longtemps en suspens. 
		– Sinon on attendra votre bon vouloir, chef, puisque c’est vous le chef. 
		Un petit rire traverse le groupe. On sait que Tony a raison mais on ne 
		veut pas non plus braquer l’autorité suprême et éterniser le quart 
		d’heure. Mais voilà déjà Didier, le petit mouton gentil, si gentil qu’on 
		se demande quel coup tordu il a pu faire à la société pour qu’elle 
		l’envoie se faire redresser dans ce centre pour jeunes délinquants… 
		Voilà le petit mouton qui présente déjà son dos pour se faire tondre, si 
		ce n’est déshonorer… Voilà Didier qui avance une explication. 
		– Chef, c’est peut-être des amoureux qui commençaient à graver leurs 
		initiales et qui ont pris peur quand ils nous ont entendus. Ils sont 
		vite partis sans tout graver. 
		Tony ricane : 
		– C’est vrai que tu fais peur avec tes vingt kilos ! 
		En même temps le chef demande, narquois : 
		– À quelle hauteur est la marque sur le tronc ? Tu vois beaucoup 
		d’amoureux graver leurs initiales à cinquante centimètres du sol ? 
		Réfléchis un peu ! 
		C’est Yann, qui n’en rate jamais une, qui répond à la place de Didier : 
		– Ah ! oui, c’est possible chef, si c’était des amoureux couchés qui 
		venaient de faire des cochonneries sexuelles et voulaient immortaliser 
		le moment.  
		On rit bien franchement. 
		– Parce que toi, tu te coucherais sur cette terre boueuse et pleine de 
		cailloux pour faire des galipettes amoureuses ! ricane le chef. 
		– Oh ! non, chef, moi je viens de la banlieue, je peux pas tomber 
		amoureux. Et d’abord, un voyou, ça se couche pas. 
		Tout le groupe y va d’un rire de soutien. Ceux qui ont compris qu’on 
		resterait là un bon moment ont posé leur sac à dos et se sont assis sur 
		le talus, ou carrément dans le chemin, sans souci de leur fond de 
		pantalon. 
		– Pas de problème, laisse tomber le chef en réponse à nos rires, si ça 
		vous plaît de prolonger le quart d’heure… 
		Il réussit à nous calmer. 
		– Ou alors c’est des nains, reprend Didier, le plus sérieusement du 
		monde. Pour des nains, c’est la bonne hauteur, ils avaient pas besoin 
		d’être couchés. 
		Les rires reprennent. Denis, un géant filiforme, les interrompt, 
		faussement sérieux : 
		– Il ne faut pas rire, les gens de petite taille ont droit aussi à une 
		vie amoureuse. 
		Didier, tout petit, le regarde sans savoir que penser. C’est lui qui 
		reprend, vaillant petit soldat : 
		– Ou alors, c’est un paysan avec son tracteur. Il tirait un engin 
		agricole un peu trop large pour le passage et il a accroché l’arbre avec 
		un bout de fer qui dépassait. 
		Décidément Didier ne renonce pas. Il croit vraiment qu’on rentrera plus 
		tôt si on donne une bonne réponse. Il est bien le seul. Le chef lui 
		demande alors s’il a vu beaucoup de champs cultivés durant notre marche 
		de la journée. 
		– Non, mais, c’est peut-être un paysan des bois… un bûcheron, un 
		forestier. 
		On fait remarquer que des engins forestiers ne passeraient pas dans ce 
		petit chemin. 
		– Ah, si ! lance Denis, si c’est des forestiers nains, ils ont de petits 
		engins. 
		Les rires là se font gras quand quelqu’un avance qu’au contraire les 
		engins des nains sont particulièrement gros. Le chef lui-même se fend 
		d’un sourire. Le calme revient quand Yann, vraiment fatigué, murmure : 
		– Y a qu’à dire que c’est les extraterrestres. On peut les mettre à 
		toutes les sauces, les extraterrestres, c’est toujours une bonne 
		explication. Ils sont venus en éclaireurs, ils ont marqué l’endroit pour 
		ceux qui vont débarquer et nous envahir. Allez, chef, on dit que c’est 
		les extraterrestres et on rentre, j’en peux plus. 
		Cet aveu épaissit le silence. C’est Louvier qui le rompt de sa voix 
		grave et posée. Louvier, bien que de notre âge, est plus mûr. Il est le 
		seul à déjà se raser. 
		– C’est vous qui avez fait cette entaille, chef. Ce ne peut être que 
		vous, ce matin, quand vous nous avez fait marquer une pause, soi-disant 
		pour vous orienter. Vous avez ensuite mis Didier en tête de file, ce qui 
		vous permettait de fermer la marche et de revenir sur vos pas. Sous 
		prétexte de vérifier qu’on n’avait rien oublié, vous avez marqué 
		l’arbre. 
		L’attention du groupe est palpable. L’argumentation paraît plausible à 
		chacun. 
		– Et pour quelle raison aurais-je fait une chose pareille ? demande le 
		chef imprudemment. 
		– Pour nous faire chier, laisse tomber Louvier. Pour avoir un prétexte 
		pour nous bloquer ici ce soir en nous posant une question tordue. Après 
		nous avoir rompu le corps en nous faisant crapahuter toute la journée, 
		vous nous achevez en nous ruinant le moral avec la promesse du foyer 
		tout proche et la question idiote pour nous bloquer près de l’arrivée. 
		Chacun sent qu’il a raison. Cette fois le silence se charge de haine, 
		tout au moins de rancoeur. 
		– Vous savez chef, dit Hector d’une drôle de voix, c’est pas parce qu’on 
		vient de banlieue et qu’on est du gibier de potence, comme vous dites, 
		qu’on est tout à fait idiots. On peut aussi avoir une cervelle et s’en 
		servir de temps en temps. 
		Le chef, visiblement déstabilisé, essaie de reprendre la main. 
		– Tout à fait d’accord avec toi, Hector. L’explication, tout à fait 
		farfelue, a le mérite d’être… plausible 
		(on sent qu’il se demande si le mot est 
		le bon). On progresse, on 
		progresse. Tiens, je vais noter ça ! 
		Il sort un carnet et un stylo de la poche latérale de son sac. 
		– Nous disons donc… des amoureux qui gravent leurs initiales, des nains 
		pour justifier la hauteur, un paysan et son engin trop large, un 
		exploitant forestier, un extraterrestre, moi pour vous ruiner le moral… 
		C’est bon, ça, il y a une progression dans la crédibilité, un petit 
		effort et on y est. 
		Mais son incitation tombe à plat. Personne ne relève l’invitation, au 
		contraire, chacun, résigné, est maintenant quasi couché sur son sac. 
		– J’ai compris, chuchote soudain Jonas à mon oreille. C’est pour le 
		concours de nouvelles du Lecteur du Val ! J’ai vu l’affiche dans le 
		hall. Il faut raconter une histoire à propos d’une marque sur un arbre 
		qui est visible le soir alors qu’elle n’y était pas le matin. Il nous 
		fait chercher l’explication pour se donner l’idée de départ. 
		Je le regarde, ahuri. 
		– Non, mais… tu délires ! Il n’est pas capable d’aligner correctement 
		trois mots oralement ! Tu le vois écrire un texte littéraire ! C’est 
		n’importe quoi ! 
		Il est évident que le chef a davantage de muscle que de cerveau. 
		– C’est pas pour lui, murmure alors Jany. C’est Sandrine qui veut faire 
		le concours. Elle en parlait hier au réfectoire. Elle disait que ça la 
		tentait mais qu’il fallait d’abord qu’elle trouve l’idée de départ… 
		l’explication vraiment originale. 
		De ce point de vue, ça se tient.  
		– Mais ouais, c’est ça, reprend Jonas pour qui la précision donne toute 
		sa logique à la démarche du chef. C’est Sandrine… Il veut se la faire 
		alors il s’imagine qu’en lui fournissant une liste des possibles pour 
		cette marque, elle va tomber dans ses bras. 
		Louvier aussi nous a entendus. Alors, quand le chef nous demande ce que 
		nous complotons et nous prie d’en faire profiter tout le groupe, il se 
		fait notre porte-parole sans même nous consulter et livre la vérité 
		toute crue. 
		– Comme je vous l’ai dit tout à l’heure, reprend-il de sa voix grave et 
		posée, c’est vous qui avez fait cette encoche sur l’arbre, ce matin, 
		lors de notre passage. Techniquement vous n’avez eu aucun mal pour la 
		faire sans qu’on s’en aperçoive. La raison de votre geste est un peu 
		plus subtile que ce que j’ai dit tout à l’heure. Certes, ça vous plaît 
		de nous pourrir la vie, d’autant plus que vous êtes payé pour ça, mais 
		il y a plus. Vous avez dans l’idée de séduire votre collègue Sandrine. 
		Dans l’idée et… dans le pantalon, cela va sans dire. Vous avez appris 
		hier qu’elle envisageait de participer au concours de nouvelles lancé 
		par le Lecteur du Val. Le texte doit partir d’une marque sur un arbre 
		qui est présente le soir alors qu’elle n’y était pas le matin. Sandrine 
		a reconnu qu’elle n’avait pas encore l’idée du départ. Alors vous vous 
		êtes dit : je vais faire plancher mon petit groupe de débiles sur la 
		question, je m’approprierai les réponses les plus intéressantes, je les 
		offrirai à Sandrine pour me faire bien voir et l’obliger à admettre que 
		je ne suis pas qu’un bloc de muscles, que j’ai aussi un cerveau… 
		Condition indispensable pour qu’elle s’intéresse à vous. Alors vous nous 
		pressez le citron pour qu’on vous livre le meilleur jus. Malheureusement 
		pour vous, le seul qui tienne la route, vous ne pouvez pas l’employer 
		puisque ça reviendrait à reconnaître vos manigances pour la mettre dans 
		votre lit. 
		Cette fois le silence est fait d’admiration. 
		– Alors là, chef, conclut Hector, vous l’avez dans l’os et je crois que 
		ça doit faire mal… sans douceur, en profondeur. Démasqué, le magouilleur 
		! Vous comptiez passer la nuit dans le lit de Sandrine, c’est râpé ! 
		Avec nous au dortoir ! Puni ! chantonne-t-il. Mais vous bilez pas trop, 
		chef, c’est pas parce qu’on vient de banlieue et qu’on est de la graine 
		de voyou, comme vous dites, qu’on sait pas être gentils quand il faut. 
		Vous verrez, on peut être câlins et doux et prévenants. Je peux vous 
		garantir qu’on fera attention, au matin il n’y aura aucune trace sur 
		votre tronc. 
		L’éclat de rire est général. La fatigue est soudain envolée. Tout le 
		groupe se lève comme un seul homme, remet le sac sur le dos sans en 
		ressentir le poids et prend le chemin du centre d’hébergement sans souci 
		du chef, qui ne peut que suivre. Et c’est Didier, le petit mouton tout 
		ragaillardi, qui se met à chantonner : 
		« Il suffira d’un signe, un matin… », 
		air connu que tout le groupe reprend en criant, ce qui donne des ailes à 
		chacun et une extraordinaire sensation de liberté, illusoire certes, 
		mais tellement agréable. 
		
		 
		
		Texte 
		
		de Serge Calmels, d'Argelès-sur-Mer (66), 2019 
		
          
          
            
              
                
                 
              	
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                La tèsta nauta 
				La marca aquí sus l’arbre, i èra 
				pas quand sèm passats aqueste matin. 
				I èra pas. Quand sèm passats, i èra pas. I èra pas. La marca sus 
				l’arbre, i èra pas. I èra pas aqueste matin. 
				E ara, i es, i es ! I a una marca. Una marca sus l’arbre. Pas 
				qu’un arbre pòrta aquela marca : l’arbre numèro dètz. Dins aquel 
				bòsc ont passam cada jorn. Totes. L’avèm vista, totes. La marca. 
				Pichòta. L’avèm vista. 
				 
				Èra l’ora del retorn a l’ostal. Caliá passar pel bòsc. Lo bòsc 
				negre, prigond. Totes los trabalhaires anavan capbaissat, sens 
				agachar res sonque sas cauçaduras. Caminavan d’arreu. Totes 
				parièrs. Los vestits parièrs. Sens color. Sens forma. Sens odor. 
				E la paraula bassa. Òmes, femnas, totes parièrs. Caminavan d’arreu, 
				matin e ser. Sens agachar res, lo cap baissat. 
				E aquí, d’un còp, vesèm aquesta marca ! 
				Un pauc en dessús de la tèrra, de las rasigas de l’arbre, la 
				marca. Jauna. (Es pas la marca de Blake et Mortimer !) Sembla 
				una pichòta sageta. Jauna. 
				Una setmana passèt, puèi doas e la marca èra totjorn al pè de 
				l’arbre numèro 10. 
				E un matin, i èra pas mai. Pas mai de marca, pas mai de sageta. 
				« Aquela empega ! » diguèron los òmes, e las femnas brandèron lo 
				cap en resson. 
				E puèi, tornèron a sas vidas voidas. 
				 
				Una setmana passèt, e… una novèla marca apareguèt ! Èra totjorn 
				sus l’arbre, mas leugièrament diferenta. Ò, gaire. Èra totjorn 
				una mena de sageta, mas mai nauta ! Al nivèl del genolh. 
				Suspreses mas indiferents, los òmes contunhèron lo camin de sas 
				vidas cruseludas. Mas sos uèlhs avián al prigond une pichòta 
				beluga. 
				La sageta demorèt doas setmanas tanben. Doas setmanas sus 
				l’arbre numèro 10. Èra tota polideta. A cada passatge, l’agachavan, 
				totes. E lo bruch de las cauçaduras se fasiá mai vigorós per 
				anar a la fabrica. 
				 
				La tresena setmana, la marca desapareguèt, encara ! Aqueste còp, 
				los òmes e las femnas diguèron : « la marca tornarà ! ». En 
				disent aquò, avián un pichòt risolet als pòts. Avián fisança, la 
				marca tornariá. 
				Benlèu dins una setmana, coma l’autre còp. 
				De fach, avián rason ! La marca repareguèt une setmana aprèp. 
				Aviá pas crescut. Èra totjorn jauna, totjorn pichòta, totjorn 
				sageta. 
				Mas èra mai nauta. Aqueste còp, èra al nivèl del coide. Sens se 
				pausar mai de questions, los òmes contunhèron lo camin. L’avián 
				vista, totes. Sus l’arbre numèro 10. E, en marchant, avián lo 
				pitre conflat d’una energia novèla, d’una energia que coneissián 
				pas. 
				 
				Doas setmanas aprèp, pas mai de marca. Mas èran acostumats ara. 
				En esperant la marca, las femnas metèron una blòda jauna e los 
				òmes una casqueta d’un jaune que les fasián semblar de poletons. 
				Jamai, de per abans, aurián pas riscat una color, una fantasiá, 
				un pel mai long, una votz mai fòrta. 
				Una setmana de mai, e la marca èra al rendètz-vos de l’arbre 
				numèro 10. Èra pas a ran de la tèrra, pas al nivèl del genolh, 
				tanpauc al nivèl del coide. Èra al nivèl dels uèlhs ! La vegèron 
				de luènh sens la cercar, la sageta jauna. Los òmes èran 
				contents, las femnas risián. 
				Avián pas mai lo cap baissat, èran fièrs. Marchavan dins lo bòsc 
				d’un pas decidit, prèstes a afrontar qualques marridas bèstias 
				al cap del camin, qualques gigants, qualques mèstres. 
				 
				La setmana dicha, pas mai de marca. S’en faguèron pas. Avián l’experiéncia. 
				La marca fasiá partida de sas vidas ara. Sabián marchar dreit 
				ara. Sabián risolejar e rire. La vida èra mai leugièra. 
				Quand venguèt lo moment de la sageta, agachèron de pertot per la 
				trapar. La vesián pas. Vesián pas la marca sus l’arbre numèro 
				10. Èran tot enjaurats. Viravan coma de baudufas, lo còr que 
				bategava. 
				Tot d’un còp, un jove aguèt l’idèa de levar lo cap. Quicòm que 
				fasián pas jamai. E crida que cridaràs : « La vesi, la vesi ! Es 
				aquí, pus naut ! Cal levar lo cap ! ». 
				E tot lo monde se metèt a tibar lo còl per véser la marca ont 
				èra. 
				 
				E aquí ! La descoberta de quicòm de pus grand qu’eles. Quicòm de 
				verd, quicòm de blau, quicòm de jaune (mas èra pas la marca). 
				Venián de descobrir las fuèlhas dels arbres, lo blau del cèl, la 
				lutz del solelh. 
				Sabián pas çò qu’arribava. Èra tròp nòu, tròp fòl. Los òmes e 
				las femnas, gràcias a la sageta jauna, avián descobèrt que 
				podián marchar dreits, fièrs, amb d’espèr en l’avenidor, la 
				fisança en eles. 
				Aprenguèron a rire, a viure la fàcia al solelh, segurs d’aver lo 
				dreit d’èsser aquí, ont èran. 
				 
				Texte de 
				Brigida 
				Viginièr, de 
				Carcassonne (11), 2019 
                 
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				Le recueil de nouvelles "Coups de théâtre à l'orée du 
				bois"  est également disponible, au prix de 9.00 €, 
				sur demande à l'adresse :info@lecteurduval.org 
				ainsi que le CD-audio, "Còps de teatre a l'aurièra 
				del bòsc" 
				au prix de 4.00 € (+ port si nécessité d'envoi) | 
             
            
              
                 
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